Les pontes de Netflix se déclarent prêt à payer leurs impôts. En septembre dernier, l’entreprise de vidéos-à-la-demande projetait de déclarer au fisc français les revenus réalisés en France, après des années à déclarer ces sommes au Pays-Bas, où les taxes sont notoirement moins importantes. L’annonce suit au Royaume-Uni : dans les colonnes de The Guardians, Netflix promet que les gains générés en 2021 seront déclarés sur le territoire, en accord avec la politique fiscale locale de taxation sur les revenus. Une transition très importante, attendu que la marque prévoit également d’investir un milliard de dollars dans la production de contenus britanniques d’ici 2021.
Netflix et le Fisc européen
Depuis l’entrée de Netflix sur le marché européen, au tournant des années 2010, le géant du streaming opère selon une tactique d’évasion fiscale tout à fait légale : le siège de l’entreprise en dehors des Etats-Unis, Netflix International BV, capte l’ensemble des revenus en dehors de régimes fiscaux localisés (en France, la TVA, payée sur le territoire, et la cotisation au CNC de 5,15% sur le chiffre d’affaires). Cette méthode a permis à l’entreprise d’échapper aux impôts prélevés par les états d’Europe pendant de nombreuses années – l’an dernier, Netflix s’acquittait de 564.000 euros d’impôts sur le revenu en France pour 6,7 millions d’abonnés, soit un chiffre d’affaires estimé à 800 millions d’euros ou 80 millions d’euros de bénéfices avant impôts, selon un étude du cabinet Park Associates. En théorie, l’enseigne aurait donc du verser 25 millions d’euros au Fisc français. Avec ses 500.000 euros, Netflix était donc très loin du compte sur notre territoire.
Au Royaume-Uni, la plateforme compte 13 millions d’abonnés et représente la solution de VOD la plus prisée – second parc de consommateurs le plus important de Netflix derrière les Etats-Unis (et ses 69 millions d’abonnés), le pays n’échappait pas jusqu’ici aux mêmes tactiques d’optimisation fiscale. Selon The Guardians, qui s’appuie sur une étude de l’institut TaxWatch, l’entreprise aurait déplacé entre 300 et 400 millions de dollars aux Pays-Bas en 2018, après un chiffre d’affaires de plus d’un milliard d’euros. Dès le mois de janvier, la France et l’Espagne devraient donc commencer à opérer selon cette nouvelle organisation, qui consistera à prélever les revenus dans les pays où Netflix opère réellement. Coup dur pour les Pays-Bas, mais une bonne nouvelle pour la salubrité des plateformes de streaming.
Cette série d’annonces concernant le marché européen intervient aussi dans le contexte d’un long bras de fer entre Netflix et les différents pays où l’offre s’est installée : la loi française sur l’audiovisuel prévoit par exemple d’obliger la marque à investir 25% des gains générés par ses recettes perçues en France dans des productions européennes. En un sens, avec cette nouvelle norme, Netflix s’assure de la bonne coopération des pouvoirs publics, et installe de nouveaux écosystèmes localisés pour mieux s’implanter en Europe.