Dans la même interview au New York Times, où Walter Hamada enterrait pour de bon le dossier Zack Snyder, le président de DC Films donnait quelques clés de compréhension sur l’avenir de la franchise au cinéma, et en dématérialisé. Selon lui, la cadence des productions super-héros de Warner Bros. devrait accélérer d’ici les années à venir. La rédaction du NYT donne une mesure nette : quatre films prévus pour le cinéma à rythme annuel d’ici 2022, et deux autres projets, prétendument plus « risqués » pour HBO Max.

Hamada confirme également les plans de connexion entre cinéma et séries télévisées actuellement à l’étude, comme ont déjà pu en témoigner les projets de Matt Reeves et James Gunn après les films The Batman et The Suicide Squad. Le président de DC Films explique que pour le moindre projet, la possibilité d’une série connexe serait réfléchie au coup par coup. Quant à nommer les fameux premiers films prévus sur HBO Max, Hamada évoquerait  Static Shock ou Batgirl. Le premiers de ces deux long-métrages est actuellement en développement, avec Michael B. Jordan à la production.

Warner Investor Day ?

Les propos du col blanc de Warner Bros. ne tombent pas par hasard : depuis le début d’année dernière, une guerre de tranchées s’établit peu à peu entre les grands groupes culturels des Etats-Unis pour le contrôle des parts de marché du streaming, inspiré par le succès du modèle Netflix et l’envie de proposer du service, payable en mensuel. Quelques semaines après le Disney Investor Day, où énormément de séries ou films Marvel Studios et Star Wars étaient annoncés devant un parterre actionnarial attentif, après une année de pertes sèches, Warner Bros. répondrait indirectement à cette accélérationnisme de franchises en tablant sur les produits locaux. Si le studio n’a pas encore obtenu de succès en salles comparable aux réussites de Marvel Studios, les Aquaman ou Wonder Woman de ces dernières années seront tout de même montés assez haut dans les cumuls des entrées en salles.

Sur le papier, la stratégie (consumériste) tient debout. En parallèle, il serait facile de trouver discutable la décision de scinder en deux l’offre de long-métrages DC Films sur la base de priorités abstraites – si Static Shock n’est pas aussi connu que Batman ou Superman, le Black Panther de Marvel Studios fut un réel événement au moment de sa sortie, avec 1,3 milliards de dollars au box office mondial. Beaucoup d’analystes avaient, à l’époque, attribué ce succès au statut de précurseur du film de Ryan Coogler, premier de l’écurie moderne des super-héros à présenter un ensemble de vedettes noires par un réalisateur noir, sur un propos ouvertement engagé. Warner Bros. n’aurait rien à gagner en se reposant sur les gros noms (supposés) de son catalogue, compte tenu des chiffres : en salles, le Man of Steel de Zack Snyder rencontra un succès bien moins important que des projets Marvel sur des personnages moins connus (Captain Marvel, Les Gardiens de la Galaxie), et jouer la sécurité n’aura pas sauvé la Justice League d’un échec retentissant.

En définitive, il paraît encore difficile de saisir l’ambition créative du studio sur les années à venir – le succès de Joker ne semble pas avoir engendré de réflexion en interne sur l’intérêt de proposer des films à plus petit budget, plus rapidement rentables et plus créatifs, susceptibles d’attirer un public plus varié que les seuls fans de super-héros. Reste à voir de quoi seront faites les prochaines années de Warner Bros. sur le terrain des surhommes, en espérant ne pas assister à de nouvelles années de saloperies comparable aux catastrophes industrielles d’hier.

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