Sorti le 13 février 2019 dans les salles obscures françaises, le film de science-fiction Alita : Battle Angel réalisé par Robert Rodriguez est l’adaptation cinématographique du manga Gunm créé par Yukito Kishiro. 

Synopsis : Lorsqu’Alita se réveille sans aucun souvenir de qui elle est, dans un futur qu’elle ne reconnaît pas, elle est accueillie par Ido, un médecin qui comprend que derrière ce corps de cyborg abandonné, se cache une jeune femme au passé extraordinaire. Ce n’est que lorsque les forces dangereuses et corrompues qui gèrent la ville d’Iron City se lancent à sa poursuite qu’Alita découvre la clé de son passé – elle a des capacités de combat uniques, que ceux qui détiennent le pouvoir veulent absolument maîtriser. Si elle réussit à leur échapper, elle pourrait sauver ses amis, sa famille, et le monde qu’elle a appris à aimer.

Dirty Angel

Le projet d’adaptation au cinéma du manga culte de Yukito Kishiro, publié entre 1990 et 1995 dans le magazine Business Jump, a été lancé il y’a déjà plusieurs années et ce n’est qu’en juillet 2018 que le film nommé Alita : Battle Angel est annoncé par la 20th Century Fox. En sus d’un casting prestigieux (Christoph Waltz, Mahershala Ali, Edward Norton, Jennifer Connely…), Robert Rodriguez (Une nuit en enfer, Desperado, Sin City) est propulsé derrière la caméra et James Cameron (Titanic, Avatar) au scénario. Impliqué très tôt dans la production du projet (Cameron a acquit les droits du film en 2003) ce dernier compte bien faire profiter le film Alita : Battle Angel des toutes dernières avancées technologiques qu’il a eu l’occasion de développer sur Avatar. 

Prenant place dans un futur dystopique à l’ambiance cyber-punk, l’histoire de Gunm se déroule au XXVIe siècle dans un monde ravagé par une météorite venue s’écrasée sur la Terre. Suite à cette catastrophe, le monde s’est scindé entre Zalem, la dernière ville suspendue réservée à l’élite de la société et Kuzutetsu « la décharge » où survit le reste de l’humanité dans la misère et la violence. Composés pour la plupart en studio, les plans de vues du film Alita : Battle Angel rendent fidèlement hommage à l’univers du manga. Particulièrement frappants, à l’occasion des plans larges, la caméra nous laisse apercevoir une Kuzutetsu gigantesque, dévastée et dégageant un véritable sentiment de fourmillement. Malheureusement, cette fidélité visuelle vient à manquer lorsque la caméra se rapproche des personnages pour nous plonger dans leur quotidien et l’univers dans lequel ils évoluent. Répugnante, poisseuse, violente, pervertie par la violence et le sexe, l’ambiance du manga créé par Yukito Kishiro se veut extrêmement sombre et où subsiste le sentiment que tout espoir est perdu. Chose que l’on ne retrouve pas dans le film qui a clairement lissé son image pour ne pas effrayer le grand public (le film est classé PG-13 aux USA). Seuls quelques passages, dans l’obscurité de la nuit où sous les fondations de la ville, se rapprochent un peu de l’atmosphère originelle du manga mais cela reste insuffisant. 

Makaku es-tu ??

Arriver à respecter le matériau originel d’une oeuvre lors d’une adaptation cinématographique est un exercice difficile et il évident que les producteurs d’Alita : Battle Angel comptaient sur le savoir-faire de Robert Rodriguez pour cela. En effet, le réalisateur avait réussi le tour de force d’adapter la série de comics Sin City de Frank Miller à l’écran en 2005 et 2014 et la présence de James Cameron au scénario a servi à rassurer tout le monde. Mêlant habilement effets visuels et traitements numériques à des prises de vues réelles, le film arrive à nous plonger au coeur de l’intrigue des premiers tomes du manga. Ou plutôt devrais-je dire « des intrigues ». En effet, les 2 heures du film tentent, tant bien que mal, d’interconnecter plusieurs chapitres de l’histoire du manga en un seul et même scénario au mépris du bon sens. On comprend alors rapidement – dès la première moitié du film – qu’Alita : Battle Angel est destiné à être le premier volet d’une trilogie et qu’il va falloir faire avec. Maladroit et indigent, frôlant parfois même le ridicule, le scénario du film s’emmêle les pinceaux entre les différentes intrigues pour, au final, nous dresser le tableau d’une histoire qui manque cruellement de sens et de portée émotionnelle. 

Ainsi, le personnage principal de Gally – renommé Alita pour des raisons de facilités et une paresse d’écriture flagrante – ne reçoit pas le traitement qu’il aurait mérité. Incarné à l’écran par l’actrice Rosa Salazar – dont le visage a été transformé en image de synthèse pour les besoins du film-, le personnage d’Alita est clairement sous-exploité et fait perdre au film une grande partie des thématiques du manga qui sont abordées au travers de son héroïne cyborg. De même, certains personnages centraux de l’histoire pâtissent de cette réécriture et perdent en profondeur.

Femme d’action

Néanmoins, le film ne déçoit pas sur les scènes d’actions et arrive à rendre les combats captivants, et ce même s’ils sont dépourvus des enjeux narratifs du manga. À ce titre, toute la scène de la course de Motorball vaut son pesant de cacahuètes tant le rythme et la chorégraphie des combats sont excellentes. Toujours lisibles, les combats du film Alita : Battle Angel sont un véritable plaisir pour le fan de la première heure et, si comme moi vous avez passé des heures entières à vous esquinter les yeux sur les dessins de Yukito Kishiro, il vous arrivera de reconnaître quelques mouvements de Panzer Kunst, l’art martial ancestral des Berserkers de l’URM. 

En définitive, Alita : Battle Angel est un film très correct et divertissant. Il est aussi important de souligner la volonté du duo Rodriguez / Cameron d’apporter quelque chose de nouveau à Hollywood et constitue une raison valable de voir le film. Dans l’ensemble assez bien respecté, l’ambiance cyber-punk de Gunm ne rencontre malheureusement pas la noirceur intrinsèque de l’oeuvre culte de Yukito Kishiro et malgré une action menée tambour battant, des effets spéciaux impressionnants et des combats impeccablement chorégraphiés, le traitement réservé aux personnages principaux et la sous-exploitation des thématiques du manga font d’Alita : Battle Angel une adaptation, en somme, assez moyenne. 

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